Eric Barbier

Eric Barbier a publié aux Editions Alcyone un deuxième recueil : Le geste obstiné du jour. Voir sous la page de D'un silence inachevé (après la photo d'Eric Barbier).

D'UN SILENCE INACHEVÉ, Eric Barbier

(Editions Alcyone, Collection Surya)

ISBN : 978-2-37405-035-5

Les textes sont accompagnés de la reproduction d'une encre.

Eric Barbier, né en 1964 dans les Pyrénées, continue là de s’essayer au métier de vivre, entre piémonts et montagnes, trouvant “pour la quotidienne” à s’employer dans une bibliothèque. Il s’engage plus précisément en écriture en 1997.
Des textes sont parus dans les revues Rivaginaires, Diérèse, Multiples, Comme ça et autrement, Sémaphore, le Mange Monde, Salmigondis, Nouveaux Délits, Gros Textes et dans diverses anthologies ; plusieurs recueils ont été publiés chez Encres Vives, Rafael De Surtis, Hélices, Le Contentieux.
 

POÈMES

Une marée d’arbres aux débords de la colline se disperse dans les premiers jours du village : sur les rives d’une mince rivière à l’arrière des crues, sables et branchages. Tes orages n’enseignent rien. Tu écoutes d’autres conversations et le lierre qu’on brûle –ces murs t’abriteront encore.
La chaleur fige les pierres mais quel rôle était le tien ?
Le travail restera inachevé. 

 
**


Arbres chargés de fruits et d’ailes
un défi à la langue des hommes.
Hier ici chaque souche abritait une source. Toutes ces eaux sont allées s’unir en fleuves, en des lointains que tu visiteras en homme sans passé.

Fumées blanches, âcres, plus haut brûlent des racines certains allument des feux sur les collines tu ne les rejoins pas et restes fidèle à ta bouche déchirée.
Sur le chemin au sortir des bois obscurs on te salue sans te reconnaître, bientôt juillet s’achèvera.
L’arbre creux abrite plus sûrement l’hospice des lendemains que l’incertitude des origines.

La friche gagne des vallons où les ombres basses de cent-vingt-sept arbres (chênes, châtaigniers, acacias, bouleaux) te surveillent.
Plus tard tu parleras maintenant s’imposent tout un peuple d’oiseaux et les échos d’une fête dont les invités te resteront à jamais absents.
                                                             Ce sont d’autres qu’ils visitent.

 


**



Revenus des montagnes d’épais nuages viennent encombrer l’intense lumière. Tu pourrais alors commencer à parler, à dire ; au moins distinguer le détail, t’approcher au plus juste. Et aussi te soucier de prendre en guise d’éventuelle obole quelques poignées de ce gravier : d’un tel passage il faudra s’acquitter, surtout si tu gardes la certitude que ce voyage ne révèlera aucune destinée
Peut-être y-aura-t-il eu une vie avant cela, et se poursuivra-t-elle si un vain espoir en avait tramé l’étoffe, si elle avait été difficilement guidée par les lueurs des crépuscules éclairant tes possessions disparues.

Ce que regarde le mica irritant la pierre noyée dans la folie des liserons fleurs pauvres achillées desséchées unies par un trait de soleil ; les courses des mésanges et le vol des ramiers organisent diverses parts du ciel.
Pourquoi s’obstiner à de telles recensions, pour conjurer quelles craintes ?
Poursuivez vos travaux à l’abri des haies d’aubépines, quelques éclats fleurissent la pénombre encore timide.

 
**


L’ordre du monde
la si belle lumière qui parfois
pointe au cœur des nuées.
L’orage déchaîne les cimes des arbres.
Eux ignorent le ciel et marient leurs racines dans de plus noirs nuages.

Le temps ne parle qu’en déluges. Les arbres doivent crier pour se faire entendre.
Eté sans murmures.

Aurais-tu pu devenir homme ? Ils t’ont offert de devenir paysage ce fut encore un échec, comme aussi tu échouas à devenir cette parole qui annonce la soudaineté de l’amour et la chaude présence de ses ombrages.


**


Plusieurs langues voudraient vivre dans ta bouche.
Tu connais la foudre, tu connais le feu, ce que cache le cœur obscur des heures.
Tu n’en dis rien.
Tout demeurera discret, hors de voix.
Tu as pour règne les milliers d’années qui composent la vie de chaque homme et pour territoire la vague venue après de lointaines falaises atlantiques ourler les ossements de ce coteau.
Tu ne sais rien en dire.

Langues multiples, chants nouveaux.
Chaque fleur blanche sur ces branches abrite les consulats de différents soleils.
Chaleur pâle, aujourd’hui : pourquoi ne pas croire avoir ici trouvé asile ? Ce fût un territoire où tes morts comprirent la sérénité choisie de ces matins.
Le passé maintenant t’est plus proche.

Extraits de D'un silence inachevé de Eric Barbier
Editions Alcyone (coll. Surya)
Copyright Editions Alcyone


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Note de lecture de Jacqueline Saint-Jean sur D'un silence inachevé :

En deux volets, d’un été l’autre, jusqu’à « l’épilogue d’août », d’une porte qui s’ouvre à celle qu’on referme, c’est un retour au lieu de mémoire, lieu d’attaches, de présences, de filiations. Un double mouvement anime ce rapport au lieu, qui habite le poète autant qu’il l’habite : « tu es le gardien d’une maison heureusement oublieuse », « mais la maison te garde ». Emergent par fragments vivaces le ruisseau, le piémont, le bois, le village, et plus près, la demeure, le balcon branlant, « l’établi dans l’atelier inutile ». Là, « le regard prend vie de toutes les formes », réveille les absents, « ceux qui ne vieillissent plus », « celle qui ne marchera plus vers toi ». Les anciens, « ceux qui lisaient sur les visages ». L’être s’ouvre au temps, proche ou lointain, « car tu as pour règne les milliers d’années qui composent la vie de chaque homme et pour territoire la vague venue après de lointaines falaises atlantiques ourler les ossements de ce coteau ». L’approche reste voilée, car ce « pays retrouvé » lui échappe, « à demi-inconnu » lui semble parfois « étranger », et le motif récurrent des vitres obscurcies, empoussiérées, embuées de pluies, se fait ici discrète métaphore de l’insaisi. Indéfini, il devient pour chacun « lieu de tous les lieux, âge de tous les âges ». Sans cesse traversé d’oiseaux, « « premiers messagers du monde ». 
La relation au lieu s’entrelace intimement au soliloque incertain. « Car la science de l’œil implique trop de doutes ». Le poète se parle en silence, « je me suis dépeuplé de vous », s’interroge, médite sur la mémoire et l’oubli, nous interpelle parfois : « As-tu su garder les liens nécessaires ? ». Il dit son peu de pouvoir de saisir le monde et le temps : « Tu ne pourras que continuer à errer dans cette langue ». 
Sensible et contemplative, habitée d’une nostalgie inquiète, l’écriture accueille la vie frémissante de la nature, « l’éphémère opulence du cerisier » ou « l’imperceptible frisson qui ride la terre ». Ses images unissent le corps et l’univers : « les lèvres saturées de ciel / A les baiser tu retrouves le goût des cailloux noirs qui tapissent cet autre ciel qu’est le lit cristallin du ruisseau… ». Entre dire et taire, elle garde ses secrets, sa part de mystère, sa tonalité singulière. 
A lire et relire, un livre attachant qui nous questionne et nous redit que creuser le silence des lieux de vie et des êtres disparus reste toujours inachevé...

Jacqueline Saint-Jean
 Article paru sur la revue en ligne Texture, de Michel Baglin, rubrique Chemins de lecture, le 30/01/2018.

 

D'un silence inachevé, Eric Barbier

Prix global en euros : 15,00€ (+ forfait port et emballage : 4,00€)

 

Poèmes d'Eric Barbier dits par Silvaine Arabo

Eric Barbier

Eric Barbier

Eric Barbier

LE GESTE OBSTINÉ DU JOUR

Eric Barbier

Editions Alcyone (Collection Surya).

Eric Barbier habite depuis 1964 au pied des Pyrénées. Poésie, proses brèves... Des textes d’Eric Barbier sont parus dans les revues Diérèse, Rivaginaires, Multiples, Comme ça et autrement, Le Mange-Monde, Salmigondis, Ecrits du Nord, Gros Textes ; plusieurs recueils ont été publiés chez Encres Vives, Rafael De Surtis, Alcyone, Hélices et Le Contentieux.


L’impatience, écrit Eric Barbier, me conduit à vouloir éprouver le temps dans l’intensité de la lecture, dans celle aussi de la page écrite, d’un regard ou de la lente inquiétude de ce qui attend sous l’écorce, l’hiver. Il sera trop tard, déjà, pour parler, mais le poème habitera de meilleurs silences.


TEXTES


Maintenant en
cet âge de
la nuit deviner de qui viennent les ombres qui courent sur les murs du songe tutoyer les absences et savoir inutile de rassembler de tels mots
                                                                   mais
celui qui parle doucement sous l’arbre après le soir serait-ce moi, lui aussi ?


**

Des senteurs
d’herbes pourrissantes
et d’orties mortes s’impatientent dans l’étouffement disjoint du muret jeunes chants d’oiseaux lointains portes entrouvertes ciel muet rien ne semble pouvoir satisfaire ce qui ailleurs ne serait que renoncement.


**

Dans la
paresseuse scénographie des
nuits en août quand une pluie esquissée vient rafraîchir un songe sinon écrasé par les chaleurs de particulières figures te reviennent tu ne sais en de telles occurrences si tu peux te réjouir de leurs visites ou si devrait t’assombrir cet impossible abandon la vie serait-elle plus légère si elles refusaient ta compagnie ?

**

Qui est
celui qui se
tient paisiblement en toi et qui très doucement voudrait retrouver parole tandis que revient le natif effroi gouvernant septembre. Assourdir les voix du deuil espérant et ne pouvoir en répéter que des bribes inquiètes pour engourdir le sentiment encore seulement deviné.


**

Qui s’
occupera encore de
tenir un tel registre fleurs d’eau vacillées par les soupçons une réponse précède la question. Sur la vie si ancienne de ce mur aucun portrait n’est retenu succession de figures qui organiseront l’ensevelissement d’octobre.

**

Aujourd’hui ils
entrent en terre
certains d’entre eux sont nus mais quelle lumière aurait pu différer leur passage ? Au pied de l’arbre déjà se décomposent les feuilles et il est trop tard pour choisir quels noms sur elles auraient dû être écrits.

**


Tous les
personnages du jardin
restent acteurs de ce long sommeil une nuit ne pourra suffire à elle seule pour en expliquer le profond aveuglement, l’isolement cendré du regard. Et pourtant comment ne pas le deviner un tel endroit participe à l’immense murmure du monde.


**

Sous l’
ombreux couvert de
la forêt malgré le soleil diamantaire fortune d’hiver tu rêves du débordement d’une marée sylvestre qui viendrait recouvrir les résonnances d’un verbe que l’histoire aurait dû condamner. A quelques mètres de là, sous l’orée vertueuse des saules coule une rivière brune gonflée par les pluies du dimanche précédent.

**

Ils ne
purent s’abandonner
à l’ordre des phrases langue perdue des coteaux eux restent voilés par une lune trop audacieuse pour une pareille heure poussière secouée d’oiseaux dans la rue trop calme le présent s’abolit en ces termes aujourd’hui. Répétition infidèle.

**


Marcher sur
ces versants à
l’abandon n’achève aucune histoire. Toute visite parmi les chênes que l’on croit voir rejoindre le ciel renouvelle les dimensions de l’immensité collinaire arpentée depuis chaque enfance, aubépines aux branches aimantes et garrots de clématites se feront les gardiennes de ce que le regard ne pourra plus détenir.

Eric Barbier
Extraits de Le geste obstiné du jour
© Editions Alcyone

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LE GESTE OBSTINÉ DU JOUR

de Eric Barbier

17,00€ + forfait port et emballage : 4,00€

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