L' année Shakespeare

A l'occasion du 400ème anniversaire de la mort du grand "Will", nous publions l'intégrale de ses Sonnets, dans la traduction nouvelle de Claude Mourthé.

Introduit en Grande-Bretagne, sous Henry VIII, par un poète de cour, Sir Thomas Wyatt, et inspiré tout d’abord par Pétrarque et les Français Marot, Mellin de Saint-Gelais ou encore Ronsard, le sonnet dit « anglais » se distingue par sa forme : chez les premiers, deux quatrains, deux tercets, chez Wyatt et les élisabéthains, en décasyllabes, trois quatrains à rimes embrassées puis croisées, disposées dans un ordre progressif : abba-cdcd-efef et deux ultimes vers en rimes suivies : gg.
À lire : Le Génie de la poésie anglaise, par Sir Michael Edwards, aujourd’hui de l’A.F. Éditions Les Belles Lettres.

Shakespeare, Sonnets (Collection Mitra)

ISBN : 978-2-37405-007-2

Né à Stratford-upon-Avon, dans le Warwickshire, William Shakespeare (1564-1616) a été reconnu très tôt comme poète, alors même qu’une épidémie de peste empêchait, à Londres, la production de ses premières pièces. Vénus et Adonis (1593) et Le Viol de Lucrèce (1594), deux longs poèmes narratifs, fortement inspirés des Antiques, et tous deux dédiés à son protecteur, le comte de Southampton, ont été publiés par un ami et voisin de Stratford, Richard Field, de même qu’il apportait sa contribution à un ouvrage collectif de Robert Chester avec Les Phoenix et Tourterelle. Cependant, il circulait sous le manteau des oeuvres plus intimes, qualifiées par un contemporain, Francis Meres, de « sugared sonnets », sonnets sucrés, certains à forte connotation érotique et relatant une liaison passionnelle avec ses déclarations d’amour, ses périodes de doute et ses scènes de jalousie. Ils sont, sans ambiguïté possible, hormis ceux inspirés par une mystérieuse dark lady, adressés à un jeune aristocrate d’une grande beauté, sur l’identité duquel les spécialistes se disputent encore, mais dont les moeurs ne font aucun doute, tout en nous renseignant sur celles de l’auteur, et de l’époque en général, à la fin du règne de la grande Elizabeth. Publiés seulement en 1609, avec ou sans l’assentiment de Shakespeare, alors définitivement célèbre après sa série des dark plays (Hamlet, Othello, Le roi Lear, Macbeth), leur dédicataire est cette unique fois un certain W.H., mystérieuses initiales qui ont encore ajouté au renom de ce chef-d’oeuvre poétique que sont les Sonnets.


Pour le théâtre et à la radio, Claude Mourthé, prix Apollinaire 1999, a traduit plusieurs Shakespeare, dont Hamlet et Macbeth. Pour TF1, il a réalisé une série Le Monde est un théâtre, au titre éminemment shakespearien (Comme il vous plaira) et publié une biographie de Shakespeare dans Folio Biographies, ainsi que deux recueils : Scènes célèbres et, pour le 400e anniversaire de la mort de l’auteur, Shakespeare comme il vous plaira, tous deux dans Folio bilingue.

 

Vous pouvez écouter la lecture de sonnets de Shakespeare en cliquant sur le fichier MP3 en bas de page.

 

Quelques extraits des Sonnets :

Sonnet 22

Mon miroir ne me convaincra pas que je suis vieux
Tant que tu détiendras la jeunesse de l’âge,
Mais quand du temps sur toi je verrai les outrages,
Que la mort vienne alors mettre fin à mes jours.

Car toute la beauté qui est la tienne encor,
Ce n’est qu’un vêtement bienséant à mon coeur,
Qui vit dans ta poitrine, comme le tien en moi :
Pourrais-je donc vieillir quand tu ne vieillis pas ?

Prends donc bien soin de toi, ô mon amour,
Tout comme je le fais, pour toi et non pour moi,
En charge de ton coeur que je veux protéger
Ainsi que son enfant, de tous les maux, une tendre nourrice.

N’attends rien de ton coeur quand le mien sera mort,
Tu m’as donné le tien, ne me le reprends pas.

Sonnet 60
 
Telles les vagues progressant jusqu’au rivage de galets,
De même nos minutes se hâtent vers leur fin :
Chacune prend la place de celle qui précède,
Et en se disputant, d’un seul élan, elles se succèdent.
 
La naissance, aussitôt qu’elle voit le plein jour,
Avance lentement vers la maturité, où couronnée,
De méchantes éclipses luttent contre sa gloire,
Et le Temps ruine alors tout ce qu’Il a donné.

Le Temps d’un trait transperce la jeunesse
Et creuse ses sillons au front de la beauté,
Il se nourrit des raretés de la nature vraie :
Rien ne reste debout que sa faux ne moissonne.

Pourtant mes vers résisteront à l’épreuve du temps :
Malgré sa main cruelle, ils te célébreront.

Sonnet 66

Lassé de ce qui suit, j’aspire au repos de la mort :
De voir que le mérite est réduit à mendier,
Et les nécessiteux dépourvus de gaîté,
Et la sincère foi par malheur reniée,

Et les décorations indûment décernées,
Et la virginité brutalement prostituée,
Et disgraciée injustement la pure perfection,
Et le pouvoir, en louvoyant, discrédité,

Et les artistes bâillonnés autoritairement,
Et la docte sottise contester le talent,
Et la vérité nue tenue pour ingénuité,
Et le Bien prisonnier au service du Mal.

Lassé de tout cela, je voudrais le quitter,
Si ce n’est que mourir, c’est laisser mon aimé*.

Sonnet 71

Lorsque je serai mort, ne me pleurez pas davantage
Que n’entendrez le monotone et triste glas,
Annonçant à la ronde que je suis disparu,
Quittant ce monde vil pour les vers les plus vils.

En lisant ces vers-ci, ne vous rappelez pas
La main qui l’écrivit, car je vous aime tant
Que je voudrais dans vos pensées être oublié
Si de penser à moi devait vous endeuiller.

Si vous jetez un regard sur ces vers,
Alors que je serai déjà confondu à l’argile,
N’allez pas jusqu’à répéter mon pauvre nom,
Mais laissez votre amour décroître avec ma vie,

De crainte que les sages en voyant votre deuil
Ne se gaussent de moi quand je ne serai plus
Sonnets de Shakespeare, traduction de Claude Mourthé

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Intégrale des Sonnets de Shakespeare,

dans la traduction nouvelle de Claude Mourthé :

prix global en euros : 28,00€ (+ port/emballage : 4,00€)

Sonnets de Shakespeare dits par Silvaine Arabo (trad. Claude Mourthé)

William Shakespeare

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